I was thinking about... us ? (J&J)

I was thinking about you,
thinking about me,
thinking about us.

Jemma & Jayden

Certains jours, on rêve de retourner se coucher, d'oublier qu'on ait pu ouvrir les yeux et quitter la chaleur de ses draps... ce n'était pas mon cas. Cette journée avait plutôt bien commencé et se poursuivait de la même manière. J'avais beau avoir toujours rêvé de devenir autre chose que le costume de l'homme en costard cravate que je revêtais chaque matin, je n'en appréciais pas moins ma vie. Creuser sur les affaires avant d'atteindre un accord ou de plaider, endosser mon costume de pompier, gratter sur ma guitare, passer du temps avec mes amis, ma famille... draguer une fille ou deux. Je n'avais d'ailleurs même pas pris le temps de repasser chez moi, et je portais le costume du jour qui me donnait un air mille fois trop sérieux pour venir dans ce nouveau bar branché qui venait d'ouvrir. Destination choisie, préméditée. A tel point que j'aurais presque pu passer pour un obsessionnel ou un psychopathe. Car ce n'était pas l'idée de venir m'amuser qui m'avait trainé jusqu'ici, ni même l'envie de retrouver qui que ce soit de mon cercle proche.

Non, c'était pour la rousse que j'entrevoyais vers le bar à cet instant. Celle qui avait eu le don de me déstabiliser, alors que je pensais tout savoir des femmes. Elle avaient toujours eu le don d'être relativement directes, si ce n'était dans leurs mots, au moins dans leur geste, et cela fait parti de mon métier de remarquer ce genre de détail. Percevoir si c'était le froid que je récoltais ou une chaleur irradiante, un désir palpable... Comme celui que nous avions partagé ce premier soir où je l'avais abordée. J'aurais passé mon chemin sans lui, sans sa réceptivité, sans le flirt léger qui s'était dessiné entre nous. Jemma. Une avalanche de flammes crapahutant, sauvages, jusque sur sa nuque. Un appel à se brûler, à se consumer à son contact. Et j'aurais tellement aimé que ce soit le cas cette nuit-là, mais elle s'était envolée, semant simplement la frustration et l'incompréhension derrière elle. Elle n'avait pas respecté le schéma habituel de la fille qui finit la nuit avec moi, alors que j'étais persuadé qu'elle le désirait tout autant que moi. Les femmes étaient diablement clair habituellement, et je ne m'en formalisais pas, préférant passer à autre chose, vivant de ce que je pouvais dérober au présent.

Mais Jemma ne l'était pas. Jemma me perturbait. Jemma me déstabilisait. Je l'avais saisi ce jeu qu'elle avait entamé, premier mouvement de pion, partie plus amusante que je n'aurais pu le penser. Elle était parvenue à conserver mon attention, à attiser l'attirance que je pouvais ressentir pour elle. C'était une première, pour moi en tout cas. Ma mère aurait déjà fait des plans sur la comète, s'imaginant que cela signifiait qu'enfin j'allais lui donner des petits enfants. Mes amis me taquineraient. Mon jumeau serait sans doute aussi perplexe que moi, devinant ces mots informulés qui me trottaient dans la tête, ce "je ne sais pas à quoi on joue, mais j'y joue" qui m'avait poussé à venir à cette inauguration. Simplement parce que je me doutais qu'elle y serait, la jolie blogueuse que j'avais sous les yeux.

Et tel le dernier psychopathe que le monde aurait vomi, oubliant derrière moi le justicier raté que j'étais, l'avocat charmeur et carnassier dans la peau duquel je me glissais jour après jour, je la fixais depuis l'entrée du bar. La musique donnait une ambiance agréable, l'une de celle que l'on aurait entendu dans un tel instant dans un film. Cette pensée m'arracha un sourire, alors que menant une main à ma gorge, je défaisais un nouveau bouton. Je m'étais déjà débarrassé de ma cravate, et ce fut d'un pas décidé que je m'avançai parmi les personnes déjà présentes. « Toi ici ? » soufflais-je à son oreille en parvenant tout près d'elle, l'une de mes mains glissant presque distraitement, mais pas suffisamment pour que ce geste soit involontaire, dans le bas de son dos. Le contact ne s'attarda pas, alors que je prenais place à ses côtés, un sourire amusé scotché à mes lèvres. « Si je m'attendais à te croiser ce soir, j'aurais sorti le grand jeu. » Souffler le chaud. Le froid. La sentir prête à s'envoler. La retenir. La laisser disparaître. La dévorer d'un regard taquin et moqueur. La désirer avec toute l'obsession qu'elle parvenait à faire naître en moi. Et pourtant détourner le regard en hélant d'un geste le barman pour qu'il s'approche. « Le cocktail maison. » Le timbre transpirant d'assurance, alors que mon regard retombait "distraitement" sur la distrayante et fascinante créature de flammes.

I was thinking about.. us ?
— with Jayden

Je n'arrive pas à croire que ça m'arrive. C'est quelque chose dont j'ai rêvé depuis que j'ai ouvert ce blog. Pas très bonne à l'école, je n'étais définitivement pas faîte pour rester assise à une table en train d'écouter un prof nous parler de choses vagues qui ne nous serviront jamais dans la vie. C'est vrai, le diamètre d'un cercle, faire un commentaire de texte sur un poème de ne je ne sais pas qui, ça servira à payer les factures à la fin du mois ? Non, je ne suis pas faite pour tout ça. Aller à la fac, passer des années et des années à faire des études comme ma soeur, Kaelyn qui est encore en école de médecine pour devenir chirurgien. Elle a du courage ma soeur, et je suis fière d'elle au fond, bien que je n'arrive pas à comprendre ce qui la motive d'être aussi à fond dans ses études. J'ai l'impression qu'elle loupe sa vie en fait en faisant ça. Je sais, c'est bête à dire mais.. je veux vivre une vie pleine d'aventures, où aucun jour ne se ressemblerait. C'est pour ça que j'ai décidé d'ouvrir ce blog, en espérant qu'il marche.

Au début, j'ai du cumuler quelques petits boulots parce qu'il ne me faisait pas vivre. Ca n'était qu'un blog comme les autres sur San Francisco. Mais j'ai tout fait pour qu'il soit le meilleur. J'ai été jusqu'à prendre des cours de codage informatique pour avoir la plus belle interface parfaite, me transformant en vraie petite geekette. Aujourd'hui, le blog marche: les nouveaux commerçants veulent que je parle de leur magasin, m'invitant à leurs soirées d'inauguration. Je ne dois même plus chercher les bons plans pour en parler dans mes articles: les bons plans viennent à moi, et gratuitement pour que je puisse tester et en parler après. Je passe mes journées à sillonner les rues de la belle ville Californienne à manger dans des restos, bistrots, à me faire faire les ongles, me faire faire des massages ou tester des instituts de beauté en tout genre. Je suis ouverte d'esprit et les nouveaux défis ne me font jamais peurs. Ce soir, c'est le bon plan qui est venu à moi puisqu'on m'a invité à l'inauguration d'un nouveau bar assez branché dans le centre ville de San Francisco. Habillée d'une chemise couleur bleue turquoise rentrée dans ma jupe taille haute, j'ai laissée mes cheveux détachés. Le maquillage est assez simple, avec un beau rouge à lèvres, comme d'habitude. C'est ce que je préfère dans le maquillage: les rouges à lèvres.

Assise sur le tabouret du bar, je regarde autour de moi pour m'imprégner de l'ambiance des lieux. Je suis avec ma tablette, qui entre parfaitement dans mon sac à main et sur lequel je note des petits commentaires pour ne pas oublier ce qui me passe par la tête quand j'écrirai l'article ce soir ou demain matin. Penchée sur ma tablette posée sur le comptoir, je sens alors quelqu'un s'approcher et me murmurer quelque chose qui m'arrache un sourire. J'essaie de garder mon visage complètement impassible quand je sens les doigts du jeune homme se promener, ou du moins, effleurer mon dos. Je relève la tête vers Jayden, essayant de ne pas dévoiler le sourire qui a pourtant envie d'étirer mes lèvres. Pas la peine de faire semblant d'être surpris. "Tu sais très bien que je suis présente à chaque inauguration de cette ville.' Je suis celle qui devrait être surprise de le voir ici. Je verrouille ma tablette, m'accoudant au bar en le fixant commander un verre. J'arque un sourcil, "Je prendrai pareil. C'est ce jeune homme qui offre, n'est-pas ?" Je lui lance un regard taquin et je regarde le barman qui attend presque l'accord de Jayden. Je sais que Jayden ne pourra pas dire non. Il ne sait pas me dire non, c'est moi qui dit non dans notre relation en fait. Ce qui m'amuse grandement.

I was thinking about you,
thinking about me,
thinking about us.

Jemma & Jayden

J'avais effectué le premier lancer de dés, et elle y avait répondu par la vérité : je savais qu'elle faisait toutes les ouvertures. Effectivement. Est-ce qu'au fond cela faisait réellement de moi un psychopathe obsessionnel ? Je n'y croyais pas vraiment. Jemma était simplement parvenue à m'attirer à elle, et ce n'était pas aussi déplaisant que cela aurait sans doute dû l'être. Je n'étais pas prisonnier, elle ne m'avait pas ficelé, et je pouvais très bien faire mine de changer d'avis et aller finir la soirée avec mes amis... voir sans le moindre doute une autre fille, puisqu'elle me filerait inévitablement entre les pattes. J'en venais presque à m'interroger sur ce qu'il se passerait, si je parvenais effectivement, un de ces soirs, à l'entraîner jusque dans sa chambre ou bien la mienne. Jusqu'à sentir la moiteur de son corps contre le mien, et me laisser bercer par l'écho chanté de son plaisir. Et si ce n'était pas le cas, un jeu tel que celui-ci finirait forcément par nous lasser, l'un ou l'autre. Je n'étais pas un familier, mais cela n'y changeait pas grand chose, ce n'était sans doute qu'une question d'amusement. Lorsque celui-ci n'existerait plus, tout ceci prendrait sans doute fin de la même manière que cela avait commencé. A moins qu'une évolution soit possible... la chambre, le mur, le toit, la terrasse. Si elle savait tout ce qui me passait par la tête. Si elle pouvait ne serait-ce qu'imaginer le mirage de son corps nu seulement éclairé par les rayons de la lune. Ou bien encore l'idée de connaître le parfum de sa peau sur mes lèvres. Sans doute s'enfuirait-elle avant même d'entamer une partie. Ou bien celle-ci prendrait des allures de défi, de plaisir... je la savais réceptive. La tension presque électrique qui s'éternisait à chacun de nos contacts, de mes gestes presque involontaires qui s'attardaient contre son être.

Mais à cet instant, c'était un jeu de fausse indifférence que mes gestes et ma présence venaient nier en bloc, que j'avais entamé. Aussi, lorsqu'elle fit remarquer qu'elle prendrait comme moi et que j'allais bien évidemment lui offrir sa consommation, j'esquissai un sourire mi-moqueur, mi-amusé en réponse à son air taquin. Nous jouions... je n'allais pas rester en reste. Tournant mon regard vers le barman, je le pris à parti d'une œillade complice. « Qu'en pensez-vous, je lui offre ou je la laisse mourir de soif ? » Mais nous savions, elle et moi, que je ne la laisserai pas sortir un centime, que ce verre, et bien d'autres, seraient de ma poche. Parce que cela se déroulait toujours ainsi. Les règles devaient persister. Tout comme ce désir inassouvi qui nous poursuivrait jusque dans nos draps. Oh j'aurais pu, mais ce serait comme avouer que j'abandonnais la partie, et je n'étais pas prêt à le faire. « On ne laisse pas une aussi jolie fille mourir de soif, si vous voulez mon avis. » « Je suis bien d'accord avec vous. » D'un geste nonchalant, je tendis un billet au barman qui se faisait commercial. Un bon point pour cet endroit, qui ne vaudrait malgré tout jamais celui où ma bande et moi nous réunissions majoritairement. Peut-être que les souvenirs n'étaient pas transposables. Cet endroit était agréable, fun, branché, mais je ne m'y sentais pas "chez moi" pour autant. Peut-être qu'il n'y avait qu'à y trainer un peu pour que ça le devienne, pour que les souvenirs embrument chaque parcelle de ces lieux.

« Et pour en revenir à ta charmante présence... on aurait pu oublier de t'inviter. Tu aurais pu être malade ou envoyer quelqu'un d'autre en éclaireur pour juger du coin. » Mais je n'avais même pas envisagé ces hypothèses avant de les émettre en cet instant. Je désirais la découvrir ici-même, apercevoir sa silhouette, laisser mon regard dériver sur ces mèches qui retombaient sur ses traits, jusqu'à m'égarer sur ses lèvres pleines qui appelaient à bien d'autres occupations que la parole. La diablesse finirait par avoir ma peau, et elle serait bien la première à pouvoir l'affirmer, si je ne mettais pas à temps un terme à ce jeu mille fois trop tentant. « D'ailleurs, qu'en pense notre si jolie blogueuse ? » l'interrogeais-je tandis que le barman s'éloignait de nous, venant de nous servir nos verres, le mien ayant trouvé refuge contre ma paume, tandis que je la fixais d'un œil taquin.

I was thinking about.. us ?
— with Jayden

Je ne suis pas une fille facile. Je ne me laisse pas aller dans les bras d'un homme facilement. De une, parce que je pense que beaucoup trop de femmes se donnent à n'importe qui sans penser à la valeur que devrait avoir une relation intime avec un homme. On a beau croire que se ne sont que les cruches qui le pense, mais je fais partie des personnes qui croient que faire l'amour, c'est important. Je sais m'amuser avec les hommes, mais je préfère m'amuser avec eux avant de me déshabiller. Ou je préfère m'amuser avec eux au lieu de me déshabiller, ce qui n'est, je pense, pas plus mal. Je n'ai jamais été à l'aise avec les relations amoureuse de toute façon, me sentant un peu paumée dans ma sexualité depuis que je suis adolescente. Est-ce que j'aime les filles ? Est-ce que j'aime les mecs ? J'ai eu du mal à comprendre qu'on pouvait se sentir attirée par les deux même si je sais dorénavant que pour construire une famille, je préférerai être avec un homme.

Est-ce que cet homme pourrait être Jayden ? Rien que cette idée me fait sourire mais elle ne semble pas si absurde. Je n'ai jamais joué à ce jeu de l'indifférence mêlée à cette ambiguïté clairement évidente dans notre relation. Si on peut appeler ça une relation. Je fais comme s'il ne m'intéressait pas (même si je dois dire qu'au départ, lorsque je l'ai recalé à cette soirée où nous nous sommes rencontrés, je n'étais clairement pas intéressée), il fait comme si je ne l'intéressait pas, chose plutôt drôle puisque c'est lui qui est venu me chercher dans l'espoir de me mettre dans son lit. Je crois que c'est sa persévérance masquée qui me plait chez lui. Je lui ai dit non mais je vaux la peine qu'il creuse au point de faire comme s'il n'était absolument plus intéressé. Assise à ce bar, je ne peux que difficilement cacher ma satisfaction de le voir ici ce soir. Je serais une menteuse si je disais que je n'avais pas pensé un quart de seconde à lui en me préparant pour cet évènement ce soir. Je ne dis pas qu'il me suit partout ou je vais, mais il est étrangement là où je me trouve lors des soirées. Appelez ça coïncidence si vous voulez, mais ça n'est pas comme ça que je l'appellerai. Je propose qu'il m'offre un verre et malgré que nous sachions tous les deux qu'il me l'offrira quand même, il discute avec le barman pour savoir s'il devrait le faire ou pas. Je les observe, silencieuse et je rougis presque lorsque l'employé dit qu'on ne laisse pas une fille si jolie mourir de soif. Jay finit par donner un billet et un verre glisse sur le comptoir en ma direction. J'hoche la tête pour remercier le barman et j'attrape la paille en fixant Jaydan pour boire une gorgée avec.

"Bon choix de cocktail", que j'annonce après avoir goûté au cocktail avant que Jaydan m'explique, ou du moins tente de m'expliquer à quel point sa présence ici est un pur hasard. Je ris légèrement en secouant la tête, roulant les yeux d'un air totalement désespérée. Je ne réponds pas, parce que nous savons tous les deux qu'il savait que je serai là. Je me tourne légèrement vers le reste du bar quand il me demande mon avis, gardant le pied de mon verre entre mes doigts que je tapote très discrètement. "J'aime la déco, c'est branché et moderne." Je lance un regard taquin à Jaydan, "Enfin, je dois avouer que les gens de ta classe sociale peuvent facilement faire tâche ici." Jaydan a ce truc chez lui qui montre qu'il est fait pour les endroits huppés. "La musique est sympa..." Je me penche vers lui pour dire plus doucement, "Mais tu sais... entre nous, il n'a rien d'original ce bar.. je lui donne six mois maximum." Je ne vais pas le gueuler non plus, surtout que le barman est juste derrière. Ça serait vache pour ce gentil monsieur qui n'a rien demandé à personne.

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